PAQUITA LA
SEVILLANE
Si vous
connaissiez l’Espagne,
Son
odorante campagne,
Ses jours
chauds aux soirs si frais ;
D’amour, de
ciel, de patrie,
Tristes
filles de Neustrie,
Vous ne
parleriez jamais.
C’est que
là sont d’autres hommes
Qu’au froid
pays où nous sommes !
Ah ! du
soir au matin,
On entend
sur la pelouse
Danser la
vive andalouse
En
pantoufles de satin.
Vous
rougiriez les premières
De vos
danses si grossières,
De votre
laid Carnaval
Dont le
froid bleuit les joues,
Et qui
saute dans les boues,
Chaussé de
peau de cheval.
C’est dans un bouge obscur, c’est à de pâles filles
Que Paquita
redit ces chants ;
Dans ce Rouen si noir, dont les frêles aiguilles
Mâchent
l’orage avec leurs dents ;
Dans ce Rouen si laid, si bruyant, si colère…
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Paquita, voyez-vous, naquit dans la Séville
Au bleu
ciel, aux soirs embaumés ;
Elle était, à treize ans, la reine de sa ville,
Et tous
voulaient en être aimés.
Oui, trois toréadors se firent tuer pour elle ;
Car le prix
du vainqueur était
Un seul baiser à prendre aux lèvres de la belle
Que tout
Séville convoitait.
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Elle faillit mourir, mais elle fut fidèle.
Quand son soldat fut de retour
A la fin de l’année il la retrouva belle
Digne
encore de tout son amour.
Mais lui, pâle et glacé par la froide Russie
Jusque dans
la moelle des os,
Accueillit tristement sa languissante amie…
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